LE RÊVE ULTIME
par Journal L'Attisée le 2016-02-01
Tout le monde rêve semble-t-il! Bien sûr, il y a les rêves lovés dans les bras de Morphée, mais il y a surtout ceux que nous faisons éveillés. Obtenir la promotion souhaitée depuis longtemps, rencontrer enfin l’âme sœur, acheter sa première maison, la liste peut être sans fin. Mais gagner un méga gros lot à la loterie, cela changerait-il le monde, notre monde? Tenir en main le fameux billet du Jackpot bouleverserait-il à jamais notre vie?
Comme dans les nombreuses publicités racoleuses de loterie, nous pourrions sur le champ quitter emploi et patron, nous envoler vers les plages de sable blanc des mers du Sud pour toute la saison froide. Caviar et champagne nous seraient servis à notre villa. Oui, oui, la dolce vitae, la véritable dolce vitae, celle dont plusieurs d’entre nous avons si souvent rêvée. Adieu soucis financiers : hypothèque, toit qui coule, auto à changer, etc.
Qu’en est-il réellement lorsqu’une telle cagnotte miraculeuse nous tombe ainsi du ciel? Il fut un temps pas si lointain où le villageois qui gagnait une dinde à la tombola, ramenait à la maison de quoi nourrir sa trâlée d’enfants pour plusieurs jours. Puis la perspective de gagner 100 000 $ a commencé à soulever les passions, autorisant cette fois la réalisation de certains rêves. Et le million avec ses sept chiffres a volé la vedette; la vente de ses billets faisant sonner les tiroirs caisses des épiceries et comptoirs de loterie. Nous pensions avoir atteint l’âge d’or, l’état de grâce de la loterie.
Mais l’homme, particulièrement lorsqu’il vit aux États-Unis ne craint pas d’aller décrocher la lune et sait faire miroiter que tout est possible. C’est ainsi qu’en début 2016 la frénésie pour la loterie Powerball s’est emparée de toute la planète. Imaginez un gros lot jamais encore atteint de 1,58 milliards. Certains n’ont pas hésité à traverser les frontières pour se procurer le billet gagnant … leur donnant dans les faits 1 chance sur 292 millions de remporter ce pactole.
Cette fois-ci, on frôle la cour des grands et le rêve ultime d’en faire partie: Bill Gates, Warren Buffet, Liliane Bettencourt … On compterait 1 926 milliardaires dans le monde en 2015. Selon le classement Forbes, ils totaliseraient une fortune de 7 050 milliards. S’il est vrai qu’être indépendant de fortune peut grandement faciliter la vie quotidienne et en éloigner maints soucis, cette situation à elle seule ne garantit ni la santé, ni le bonheur et encore moins la paix et la quiétude. Notre vie pourrait-elle plutôt risquer de devenir un véritable cauchemar?
Disons d’abord adieu « à la sainte paix », et pensons à la convoitise suscitée par un tel gain. Toutes les institutions financières vont se ruer sur nous « comme la misère sur le pauvre monde » pour mettre la main sur notre magot, sous prétexte de le faire fructifier. Les médias ne nous lâcheront plus d’une semelle, épiant, commentant et au besoin ridiculisant (ça nourrit la nouvelle) tous nos faits et gestes; rappelons-nous la célèbre famille Lavigueur. Les organismes de charité et fondations de tout genre ne seront point en reste et ne cesseront de nous solliciter pour leurs bonnes causes. Nous deviendrons bon gré, mal gré des philanthropes de l’humanité.
Si nous n’avions pas encore connu le chantage affectif, et bien ce sera vite fait. Tous les membres de notre famille proche ou éloignée, nos amis passés, présents ou futurs, nos voisins et ex-collègues de travail se penseront en droit de profiter dorénavant de nos largesses. En désespoir de cause, il nous serait toujours possible de partir sans laisser d’adresse, mais notre milliard lui a besoin d’une adresse, on ne peut tout de même le transporter dans un bas de laine. Il faut lui consacrer temps et énergie en collaboration étroite avec des conseillers financiers.
Pourtant, il est non seulement permis de rêver, mais souhaitable de le faire, et pourquoi pas tenter de donner un petit coup de pouce au destin en se procurant quelques billets de loterie. Un peu à la façon d’un petit héritage, un gain inespéré peut nous permettre de rendre notre vie plus confortable, de faire quelques folies et de gâter nos proches sans que notre vie ne devienne pour autant un cauchemar. D’ici là sachons profiter pleinement de chaque moment de notre vie. Le bonheur bien souvent se trouve en petits morceaux tout au long de celle-ci.
Clémence Lord