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Il était une fois des villages autonomes – Saint-Jean-Port-Joli suite décembre 2023
par Journal L'Attisée le 2023-12-13


Il était une fois des villages autonomes – Saint-Jean-Port-Joli (suite)


Ferblantiers 
Les ferblantiers Georges Morneau (1935, 1940, 1945, 1949, 1953, 1957, 1958, 1962, 1963, 1965) et son père Tobie Morneau (1935, 1940, 1945) ont fait l’objet d’une chronique en février 2017 dans ce mensuel et ne seront pas abordés plus en détail. Les listes d’électeurs nous apprennent qu’Adélard Caron (1940, 1945, 1949) a aussi exercé ce métier.1

Forgerons
Les recensements, les listes d’électeurs et autres documents d’archives nous indiquent qu’un nombre important de forgerons ont exercé leur métier à Saint-Jean-Port-Joli. En 1827, il y en avait 10 en activité. Leur nombre baisse au fur et à mesure que le cheval fait place à l’automobile. En 1965, il n’en restait que quatre2. Les listes d’électeurs nous permettent de connaître le nom de plusieurs forgerons et les années pendant lesquelles ils étaient en activité ; ce sont : Alfred Bélanger (1949, 1953, 1957, 1958, 1962), Anatole Caron (1957, 1958, 1963, 1965), Joseph Caron (1957, 1958, 1963), Bernard Jean (1935, 1945, 1953, 1957), Alfred Laurendeau (1935, 1940), Gérard Laurendeau (1935, 1940), Julien Laurendeau (1940), Adrien Lord (1957), Laval Pelletier (1965), Amédée Pruneau (1940), Théophile St-Pierre du deuxième rang du secteur Trois-Saumons (1935, 1940, 1945, 1949, 1953, 1957, 1958, 1962, 1963, 1965), Victor St-Pierre (1963), Wilfrid St-Pierre (1949, 1953) et Alfred Thomas (1935)3.

Gardiens de phares
Le phare du Pilier-de-Pierre est en activité de 1830 à 1961 ; il est en service pendant la saison de navigation qui s’étend d’avril à novembre. Le phare est reconstruit en 1843 selon les plans de Charles Atherton, ingénieur civil à la Trinity House de Québec, et il est inauguré le 28 septembre de la même année. Les gardiens qui s’y succèdent sont M. Hall, M. Ross, M. Smith, Charles Julyan (1843-1854), Thomas Roche (1854-1860), Henry Hardin (1860-1862), D. Vahghan (1862-1863), Damase Babin (1863-1874), Louis-Damase Babin (1874-1901), G.-Octave Leclerc (1902-1912), Eugène Leclerc (1912-1922), Joseph Giasson (1922-1926), Alphonse Bourgaut (1935)4 et Antonio Bourgault (1926-1961). La lumière du phare fonctionne à l’huile de charbon. Le gardien monte dans la tour de trois étages au coucher du soleil, pour l’allumage du phare, et au lever du jour pour son extinction. Il séjourne dans la maison de l’île avec sa famille. Outre la résidence, il y a un atelier de bricolage, un four à pain, un débarcadère, un treuil pour la marchandise, un quai et une plateforme. La famille Babin a fait de nombreuses améliorations au site et a amené une vache sur l’île pour avoir du lait frais. Nostalgique de ses beaux pâturages verts, la vache a traversé le fleuve à la nage sur une distance de trois miles pour retrouver son ancienne demeure. Une autre de ses congénères a tenté la même expérience quelques années plus tard mais a péri pendant la traversée5.

Le phare de la Roche-à-Veillon (Algernon Rock), érigé en 1876 par le gouvernement canadien, est situé à quelques encablures au sud du Pilier-de-Pierre. Il est construit en bois de forme carrée, surmonté d’une lanterne à toit rouge ; le tout est érigé sur une jetée de bois peinte en noir. Sa lumière est blanche et fixe. En 1905, on reconstruit la base en ciment et on ajoute une petite maison pour y loger plus adéquatement le gardien. En 1914, le phare est détruit par un incendie pour une seconde fois puis il est rapidement rebâti. Le dernier gardien, Arthur Leblanc6, quitte la maison en 1927. Le 9 novembre 1947, le C.G.S. Chesterfield s’ancre près de la roche à Veillon pour quelques jours afin de défaire le vieux phare et y installer une structure de fer, petite tour à claire-voie, avec une lumière ; il repart le 13 novembre. Depuis 1960, c’est une bouée rouge, la H-98, qui prend place au sud du rocher d’avril à novembre. Les derniers vestiges du phare de la Roche-à-Veillon ont été balayés par la tempête de vent qui s’est abattue les 10 et 11 novembre 20147.

Laitiers
Quelques personnes ont exercé le métier de laitier à Saint-Jean-Port-Joli mais le plus connu d’entre eux est certes Jean Chouinard (1907-1987) fils d’Athanase et d’Albina Desrosiers. Au début des années 1930, Jean se demande comment améliorer sa situation financière qui se limite à quelques dollars par mois à la beurrerie du village. Un matin au début de juin 1932, il décide d’embouteiller une partie du lait de ses vaches ; il écrème et puis remplit quelques demiards de crème. Il attelle le cheval à la charrette et se met à la recherche de clients. Il existe bien un autre laitier (Gaudias Poitras) dans la paroisse mais il croit que la période est propice avec les touristes qui s’en viennent. La première journée, il vend 13 pintes de lait et 3 demiards de crème qui lui rapportent 0,80 $ ; c’est le double de sa paie à la beurrerie. Peu à peu sa clientèle augmente et il livre 30 pintes de lait par jour en plus de la crème. Son cheptel ne suffit plus et il commence à s’approvisionner chez son voisin Maurice Caron. Il se lève tôt et travaille sept jours par semaine. Cela ne le fatigue pas ; il aime son travail, rencontrer les gens et discuter.

Vers 1947-1948, Jean cesse l’élevage des visons pour se consacrer pleinement au métier de laitier. Il achète la grange et les terres de son voisin Joseph Gagnon. Il agrandit sa laiterie, la modernise et se dote de trayeuses électriques. Il acquiert une machine pour embouteiller le lait et l’encapsuler en plus d’un refroidisseur. En 1960, le propriétaire de la laiterie Moderne de La Pocatière vient lui proposer la pasteurisation. C’est la fin de ses craintes ; Jean avait toujours eu peur de la propagation de maladies avec le lait cru. Quelques années plus tard, il s’allie avec la laiterie Cité de Québec qui l’approvisionne en produits laitiers. Jean se retire en 1977 et confie le commerce à Jean-Marie, Clermont et Nicole8.
Jean Chouinard à ses débuts comme laitier

En 1960, Jean inaugure un bar laitier. Son intention initiale était de vendre du lait au verre mais les machines à crème molle sont apparues et il en a fait l’acquisition. En 1972, il transfère le commerce à son fils Clermont et son épouse Nicole qui veilleront sur le commerce pendant plus de 30 ans. En 2006, Daniel, le cadet des fils de Jean, et son épouse Chantal prennent le relais au bar laitier. Ils entreprennent d’importants travaux doublant pratiquement la superficie du bar laitier9. En 2022, on relocalise le commerce dans l’ancienne laiterie rénovée10.

Suite dans le prochain numéro.


ERRATA : Dans le journal d'octobre à la page 33, dans la section « Beurreries », au second paragraphe, nous aurions dû lire « La beurrerie du village » et non La beurrerie de la Station.


  1. BAC, Listes des électeurs de St-Jean-Port-Joli de 1935 à 1965. Les années entre parenthèses indiquent les périodes pour lesquelles l’électeur a déclaré le métier.
  2. BAC, Listes des électeurs de St-Jean-Port-Joli pour 1965, arrondissements no 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94 et 95.
  3. BAC, Listes des électeurs de St-Jean-Port-Joli de 1935 à 1965.
  4. BAC, Liste des électeurs de St-Jean-Port-Joli de 1935. Il s’agit peut-être d’un remplacement ou d’une erreur car Alphonse n’est pas cité dans d’autres documents comme gardien de phare.
  5. Michel Chassé, Le phare du Pilier de Pierres est reconnu comme édifice du patrimoine, L’Oie Blanche, vol 8, no 35, Montmagny, 29 août 1993, p.7 et Le phare du Pilier de Pierre a gagné ses lettres de noblesse, CMATV, 5 décembre 2013.
  6. Gérard Ouellet, Dans les rayons d’un phare à Saint-Jean-Port-Joli, l’Action catholique, vol 1, no 42, Québec, 10 octobre 1937, p. 19. M. Leblanc a gardé le phare pendant 23 ans. Son prédécesseur était surnommé M. Tranquille,
  7. « Disparition de la base du phare de la Roche-à-Veillon », Le Placoteux, 8 janvier 2015, informations tirées du site internet : https://leplacoteux.com/disparition-de-la-base-du-phare-de-la-roche-a-veillon/ le 19 mars 2023.
  8. Yolande Chouinard, La maison où je suis née …, publication privée, septembre 2002.
  9. « La petite histoire du bar laitier Chouinard », informations tirées du site Internet : www.barlaitierchouinard.com/histoire le 30 novembre 2022.
  10. Anne-Frédérique Tremblay, Le bar laitier Chouinard relocalisé dans la laiterie familiale, L’Oie Blanche, 2 juin 2022, informations tirées du site Internet : https://journaloieblanche.com/le-bar-laitier-chouinard-relocalise-dans-la-laiterie-familiale/ le 30 novembre 2022.



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