Par Sylvain Lord     

 / Boucherie Érasme Chouinard (suite)
Conrad Fortin (1927-1986) reprend la boucherie Érasme Chouinard. Monsieur Fortin est originaire de Cap-Saint-Ignace et il poursuit la tradition de boucher dans la famille. Son grand-père alimentait les chantiers forestiers de la route de l’Espérance. Il cesse l’abattage qui se faisait en bas de la boucherie et commence à diversifier les produits offerts.

Son fils Michel acquiert le commerce en 19871 et le modernise. Il ajoute un petit agrandissement à l’arrière et aménage une aire de travail plus propice à la transformation des aliments. Il commence à offrir des produits maison comme les cretons, la tourtière puis ajoute de plus en plus de plats cuisinés comme les spaghettis et les repas familiaux du soir. Plus il diversifie ses plats et plus les clients en redemandent; sa conjointe l’aide énormément avec son esprit d’entrepreneure. Michel a une excellente réputation; les usines d’en face sont de bons clients de même que les gens du village. La saucisse est l’un de ses produits phares; il alimente la Coureuse des Grèves, les Gâteries de la Mie, la Roche à Veillon, l’Auberge du Faubourg, quelques casse-croûtes et autres établissements. La viande hachée est aussi en demande par plusieurs commerces. Vers 2016, il diminue ses heures de travail à seulement 3 avant-midis par semaine. Il continue de servir ses bons clients de même que les commerces. Il ferme définitivement boutique au début de la pandémie en 20202. Rares sont les commerces de Saint-Jean-Port-Joli ayant eu pignon sur rue aussi longtemps sans changer de vocation; la boucherie fondée par Érasme Chouinard a été en activité pendant 119 ans!

Revenons à Charles qui exploite son commerce sous la raison sociale « Charles Chouinard et Fils enr ». Les listes d’électeurs de Saint-Jean-Port-Joli nous indiquent qu’il exerce son métier de façon continue entre 1935 et 19733. Il décède le 7 septembre 1991. Son fils, Roger, commence à travailler à la boucherie dès ses 17 ans; il l’acquiert en 1973 et l’agrandit par l’arrière. Le 30 avril 1979, Roger et son épouse, Geneviève Bernier (1950-2014), font l’acquisition du centre commercial4. En 1989, Geneviève devient propriétaire de Chouinard chaussures. La compétition de plus en plus féroce force la boucherie à se tourner vers les plats cuisinés, à innover avec de nouveaux produits comme la sauce C.H. tout en continuant avec ses produits traditionnels5. Le commerce n’est plus en exploitation depuis quelques années. Outre les boucheries précédentes, les listes d’électeurs de 1935 à 1965 nous signalent les noms suivants : Amédée Giasson (1949), Richard Marquis (1965; 24, de Gaspé Ouest), Thomas Morneau (1953, 1958, 1963, 1965) et Jacques St-Pierre (1963, 1965)6.

Coop La Paix
L’Action catholique mentionne, dans son édition du 6 mars 1940, que la coopérative compte déjà une soixantaine de membres; elle va s’établir dans la maison de Josaphat Robichaud là où était le marchand Joseph Gaumond. Son premier gérant sera Charles-Émile Gagnon7. Elle débute ses activités le 8 mars 1940 dans la maison Fleury (4, place de l’Église)8. Ses membres fondateurs sont : Albert Bérubé, Gérard Caron, Luc Bourgault, Donat Chouinard, Marc Chouinard, Gérard Deschênes, Rosaire Dubé, Simon Fortin, Joseph Guimont, Auguste Leclerc, Léonard Ouellet et Omer Ouellet. L’ouverture de ce nouveau commerce ne fait pas l’affaire de tout le monde et entraîne la fermeture ou une baisse d’achalandage de plusieurs petits magasins9. Ses premiers produits sont principalement destinés aux cultivateurs; ils comprennent des aliments mais aussi des vêtements, des chaussures, des outils simples et un peu de quincaillerie.

À sa première année d’activité, la coop enregistre des ventes de 11 226$. C’était l’époque où les souliers se vendaient 1.19$ et les chemises 0.65$. Les premières années, le magasin ouvre six jours par semaine et ce jusqu’à 22 heures10. La coopérative est citée en exemple en 1944 pour sa saine gestion; elle affiche un chiffre d’affaires de 70 401.37 $ et une ristourne de 2256.82$11. Elle déménage dans de nouveaux locaux en 1952 (8, avenue de Gaspé Ouest). Elle favorise l’établissement de commerces similaires dans les municipalités environnantes dont l’Espoir à Saint-Aubert et la Victoire à Saint-Damase. La Coop déménage en 1976 sur son site actuel dans un nouveau bâtiment (321, route de l’Église)12. Elle passe sous la bannière IGA Boniprix en 1982 et prend entente avec la Société des Alcools du Québec pour un local attenant13. Un agrandissement est décidé en 1987 et les travaux sont complétés le 10 mai 198814. Son rapport financier de 2021 indique un chiffre d’affaires de 15 647 244 $15 et un déficit de 4557 $; l’année précédente, les mêmes chiffres étaient de 16 179 707 $ et 274 617 $ respectivement. 

Épiciers
Les listes d’électeurs de 1935 à 196518 et autres documents 19, nous dévoilent quelques épiciers à Saint-Jean-Port-Joli; ce sont : Fernand Chamard (1958, 1962, 1963, 1965; 220, de Gaspé Ouest - site actuel de la poissonnerie), Roméo Daigle (1962), Albert Lebel (1965), Alphonse Leblanc (1962), Thomas Morin (1957), Thomas Morneau (1957, 1962, chemin du Roy), Maxime St-Pierre (854, avenue de Gaspé Ouest), Édouard Caron et Arsène Ouellet20. Alphonse Leblanc a exploité son épicerie près de la Station de la fin des années 1940 jusqu’à 1962. Il possédait un permis d’alcool qu’il a renouvelé en 196121; Fernand Chamard lui a succédé.

Quant à Albert Lebel (1925-1990), il s’agit bien plus que d’une épicerie. Son commerce remonte à au moins 1947 alors22 qu’il ne porte que le nom de son propriétaire comme raison sociale. Le nom « Épicerie 5-10-15 » apparaît en 195523 puis c’est successivement « Albert Lebel 5-10-15 », « Les Variétés Lebel enr. » alors que les produits se diversifient et finalement « Les Nouveautés Belgram ». Le magasin est vendu à Roger Gauvin de Saint-Pamphile en janvier 199324. Il en prend possession le 18 mars et l’inaugure officiellement le 30 juin25. Il a tenu le magasin de linge et de chaussures jusqu’au 30 septembre 2021.